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Rendez-vous à 3 750 mètres

     Nous sommes le vendredi 8 juillet, il est dix-sept heures. Je m'empresse de rentrer chez moi pour récupérer mes affaires. Cela fait près de deux semaines que j’attends impatiemment ce week end. En effet,  il s'agit de la date de ma première ascension d'un sommet en alpinisme. Il est prévu que nous atteignions le sommet dimanche 10 juillet vers huit ou neuf heures du matin.

Heureux hasard, ce dimanche est aussi le jour de la finale de l'Euro 2016 où la France essayera de décrocher son troisième titre européen contre le Portugal. Je n’oublie donc forcément pas de prendre avec moi mon drapeau Français pour cette ascension. 

Nous partons donc avec Alex et Simon, deux amis de Grenoble, le vendredi en direction de la maison familiale d'Aline située dans le lieu-dit de Pontis. Toutes les autres personnes de cette expédition sont déjà sur place: Sophie, Amélie, Aline, Yohan et Pierre. Après trois heures de route, nous nous retrouvons donc tous sur la terrasse d’un restaurant près de Pontis pour y dîner. La soirée est très sympa et tout le monde a déjà hâte d'être à demain. 

Après une courte nuit de quelques heures, il est temps de préparer son sac et ses affaires. Nous partons direction Vallouise et le magasin de location d'équipement d'alpinisme. Nous louons donc crampons et paires de chaussure. Chacun possède ou a déjà récupéré le reste : piolet, casque, baudrier, vêtements techniques. 

une partie de mon équipement prêtée par un de mes collègues

Le chemin allant du magasin de location jusqu'au parking nous met immédiatement dans l'atmosphère. Plusieurs cascades s’extirpent d’impressionnantes barres de montagnes. Scotché à la fenêtre ouverte, je tente tant bien que mal de prendre des photos malgré les secousses de la voiture. Certaines seront tout de même pas mal (Merci le mode "sport" de Canon !). 

Cascade et une infime partie du parc national des Écrins / Photos: Guillaume Labergerie

Arrivés au parking, nous prenons et vérifions nos sacs une dernière fois de façon à ne rien oublier. Ceci fait, nous entamons la première partie de la marche à savoir une randonnée de deux heures et demi. 

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Le paysage est déjà magnifique sur cette première partie. Je retrouve beaucoup de similitudes avec Cascade Saddle, un des treks que j'ai fait en Nouvelle Zélande il y a plus d'un an. Les montagnes sont très escarpées et les roches sont d'un gris que j'aime beaucoup. On se sent réellement en haute montagne. Après avoir marché en discutant avec Pierre et Aline, je pars un peu plus devant, afin de faire quelques photos. Tous les dix mètres, l'angle de vue change, et m'offre un nouveau paysage que j'ai envie de photographier. Après avoir pris un peu d’altitude,  nous arrivons près d'une rivière. Ici, nous découvrons le glacier que nous gravirons cet après-midi et dans la nuit après une courte nuit au refuge.

 

Le seul petit hic – pour l’instant –  vient de mes chaussures que j’ai louées le matin même. Je commence déjà à avoir des ampoules au niveau du talon… Allez, on essaye de ne pas y penser et on avance !

Nous arrivons quelque temps plus tard au premier refuge. Nous y retrouvons les deux guides et après avoir fait une pause déjeuner, nous repartons en direction du glacier. Environ trois cents mètres de dénivelé plus tard, nous nous retrouvons au pied de cet amas de glace. C’est beau. 

Le glacier blanc / Photos: Guillaume Labergerie

La deuxième et la meilleure partie de notre aventure peut enfin commencer. Les deux guides nous montrent avant de repartir comment mettre les crampons, nous apprennent à marcher avec, et nous initient à l’utilisation du piolet. Après environ vingt minutes d’entrainement, nous nous encordons en deux groupes. Je suis avec Aline, Pierre Johan et notre premier guide. L’autre cordée se compose du deuxième guide, Alex, Amélie, Sophie et Simon.

 

Le paysage est vraiment magnifique, le glacier est cassé à différents endroits et on peut apercevoir plusieurs crevasses. La Roche Faurio est une ascension connue pour sa facilité dans le monde de l’alpinisme. Même si le risque zéro n’existe pas, nous n’en prenons donc peu.

Nous apercevons alors le refuge des Ecrins où nous allons passer la nuit. Il parait proche mais ne l’est finalement pas tant que ça. Il nous faudra entre une heure et une heure trente environ pour l’atteindre.

 

Tout va bien jusque là. Cependant, plus on avance et plus j’ai du mal à respirer. Arrivé un peu en dessous de 3 000 mètres, un très fort mal de tête m’envahit. Je connaissais déjà cette sensation due à l’altitude mais jamais d’une façon aussi forte et soudaine. Il est vrai que c’est la première fois que je monte à pied aussi haut et si rapidement. J’essaye de respirer calmement mais chaque pas est plus difficile que le précédent. C’est ce qu’on appelle le mal de la montagne. Je n’avais aucunement pensé l’avoir un jour après avoir vécu plus de trois mois dans les montagnes Néo-Zélandaises. Cependant, d’après mes recherches effectuées après cette aventure, j’apprends - avec soulagement - qu’il peut arriver à tout le monde. Le fait est que nous sommes montés de 3 000 mètres assez rapidement, que ma semaine précédente a été fatigante et que nous avons dormi seulement cinq heures la nuit dernière. Toutes ces choses sont les causes de mon mal de montagne.

 

 Le refuge est maintenant très proche. Il ne nous reste plus qu’à monter environ 100 mètres assez raides. Je me sens de plus en plus faible et j’ai bien hâte d’arriver au refuge. J’aimerai m’allonger là et me reposer mais je n’ai pas le choix alors j’avance. Après un gros effort, j’arrive enfin au refuge (loin) derrière mes amis. Ma première nuit en refuge français se passera donc ici, à 3 000 mètres d’altitude.

Ma première impression sur ce refuge à été son impressionnante taille. Il peut accueillir au moins cent personnes. Comparé aux petits refuges Néo-Zélandais que j’ai connus, je suis un peu déçu car cela perd le charme de la montagne.

Le repas est préparé par un cuisiner. La nourriture est certes bonne, mais je préfère personnellement me faire à manger en montagne. Je fais peut-être le difficile sur ce coup, mais je me sens mieux dans une cabane avec un petit feu et un repas au réchaud plutôt que dans un immense refuge avec tout à disposition et un tarif très excessif à 70 € la nuit avec le repas.

Endormis à 21 heures, nous nous réveillons à 3 heures du matin pour prendre notre petit déjeuner et préparer nos affaires. Une demi-heure plus tard, nous commençons à descendre les 100 mètres de dénivelé qui m’avait tant posé problème la veille. Vous imaginez bien, c’est beaucoup plus facile en descente. Nous nous retrouvons donc en bas de cette pente raide, et mettons nos crampons à la seule lueur de la lune et de nos frontales. Après cela nous commençons à marcher en direction de la Roche Faurio, toujours encordés avec nos acolytes de la veille.

Alex et sa frontale / photo : Guillaume Labergerie

Après une ou deux heures de marche sur du plat, nous commençons à gravir la dernière partie de notre aventure. Environ 1 000 mètres de dénivelé positif nous sépare du sommet.

 

 

L’aube s’installe peu à peu et donne au ciel une couleur rose et bleue pâle. J’ai déjà vu pas mal de lever de soleil, mais celui-ci a un goût particulier car nous sommes dans un environnement vide de toute civilisation entre toutes ces montagnes. Le fait également de faire un effort, ici la marche très sportive, permet de profiter encore plus des paysages. J’ai l’impression de réellement mériter cette beauté et d’être aller la chercher. Avec mon reflex Canon 450D au cou, j’essaye de faire un maximum de belles photos et d’immortaliser au mieux cette journée. Plus nous gravissons cette montagne et plus le panorama devient sensationnel sous nos yeux. Les couleurs sont quant à elles toujours plus jolies. Nous commençons à voir le soleil se refléter sur les sommets environnants. Le moment tant attendu est imminent… Ça y’est, le premier rayon apparaît et peu à peu le soleil s’agrandit. Quelques nuages passent devant lui, et m’offrent un cliché dont je suis très fier : Le soleil s’apparente à une flamme. C’est comme si la montagne enneigée prenait feu, donnant lieu à une contradiction totale.

Le feu de montagne / Photo: Guillaume Labergerie

Nous continuons notre marche et arrivons finalement à une cinquantaine de mètres du sommet. Nous nous posons quelques minutes. Notre guide nous informe alors qu’une partie d’escalade est nécessaire pour atteindre ces fameux 3 750 mètres. Ma première expérience en escalade aura donc lieu ici. Je dois bien avouer que j’avais une certaine appréhension au moment de me lancer mais j’étais si proche du sommet qu’il m’était inconcevable de ne pas y grimper.

Nous commençons à escalader les derniers rochers. Parfois le vide est à gauche, parfois il est à droite et surprise ! il l’est aussi parfois des deux cotés… Petite sensation de vertige mais je continue tout de même. Cette dernière partie ne dure pas très longtemps et nous arrivons assez vite au sommet. Quelques nuages s’invitent à la vue panoramique, mais ce n’est que pour un temps. Nous ouvrons grand nos yeux et voyons à perte de vue tout le parc national des Écrins et plus loin encore. C’était magnifique et cela me rappelle à quel point j’aime la montagne.

L'ascension de la Roche Faurio / Photos: Guillaume Labergerie

Après quelques minutes passées au sommet de la Roche Faurio, nous entamons la descente qui se fera globalement rapidement. Je ressens tout de même une sacrée gène au niveau de mes talons. J’avais mis des pansements spéciaux en arrivant au deuxième refuge mais mes ampoules étaient déjà bien ouvertes. Redescendre a donc été rapide mais non sans souffrance. J’effectue les derniers kilomètres en compagnie d’Alex qui a le même problème que moi. Les autres avancent bien plus vite et lorsque nous arrivons en bas, nous nous retrouvons tous pour partager une bonne bière au restaurant situé près du parking.

 

L’ascension de la Roche Faurio dans le parc national des Écrins est une des voies les plus faciles en alpinisme. Elle est accessible à tous et je la conseille vraiment à ceux qui souhaitent débuter l’alpinisme.

 

Ce week end de juillet était parfait jusqu'à là, mais à malheureusement fini d’une manière tragique avec la défaite de la France lors de la finale de l’Euro contre le Portugal…

Guillaume Labergerie

l'équipe au sommet / Photo: Pierre Coursimaux
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